Josias Semujanga (Photo: Karirima)

Le discours négationniste, une rhétorique politique, Par Josias Semujanga (Université de Montréal)

COLLOQUE IBUKA BELGIQUE, 25 Mars 2022,

A. Retour sur le titre. Préalables

  1. Je voudrais commencer par une brève remarque préalable sur le titre de ma communication.

Le discours négationniste vise une action politique; il s’agit de montrer les stratégies utilisées, rhétorique, pour s’adresser au destinataire/lecteur/auditoire, etc. Il s’agit également de poser deux questions : comment et pourquoi? Et non qui et quoi?

La démarche part du postulat suivant : ce sont les pratiques discursives qui configurent les pratiques sociales et non l’inverse comme le disent les marxistes. Autrement dit, ce sont les discours qui circulent dans la société qui justifient les pratiques sociales. L’analyse du discours s’intéresse aux choses dites, à l’archive.

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Exemple général : dans nos universités, on parle depuis une dizaine d’années de la clientèle du premier cycle et dans les hôpitaux les patients s’appellent les usagers. Or, il ne faut pas spécialiste de Michel Foucault pour comprendre que ce vocabulaire vient du monde marchand : le discours de l’économie. Nommer les choses, c’est avoir le pouvoir de contrôler les pratiques; d’où le modèle managérial de nos institutions publiques, avec ses hiérarchies et ses pouvoirs.

  1. Ainsi analyser le négationnisme, c’est le situer dans le contexte du génocide. Le génocide et le non-génocide (la négation) sont deux mots pour évoquer, parler des événements tragiques, des massacres. Le négationnisme est du point de vue sémantique : le refus d’un mot, le génocide : l’extermination intentionnelle et planifiée d’un groupe humain pour des motifs politiques ou religieux. Décortiquer le négationnisme, c’est s’intéresser à son archive, à la manière dont le génocide est dit ; montrer comment les événements sont racontés par les négationnistes, mais aussi pourquoi le choix d’une telle rhétorique. Il s’agit de s’intéresser au passé pour revenir au présent afin d’éclairer le temps.
  2. Il y a 28 ans, après le génocide des Tutsi, le discours de la négation de l’événement n’a pas beaucoup dans ses structures et ses présupposés. Le discours négationniste nie ou relativise les faits, aujourd’hui, comme au début des massacres par une argumentation sophiste : une argumentation mensongère malgré l’apparence.
  3. Entre le négationniste et l’historien il y a un dialogue de sourds ; d’où l’importance de l’analyse du discours pour comprendre le message du négationniste et comment fonctionnent les présupposés de sa communication.
  4. Montrer que ce discours vise une action politique et non la vérité des faits, ce n’est pas non plus un discours délirant, comme on le dit souvent. Tel est notre propos

Le négationnisme du génocide des Tutsi, une arme politique/géopolitique

Typologies des négationnistes

Les génocidaires sont les négationnistes originels (Éric Gilet : La répression du négationnisme au Rwanda)

  1. Pourquoi refuser le mot génocide pour qualifier les massacres des Tutsi du Rwanda, des Juifs ou des Arméniens? Parce que le mot génocide procède d’une éthique politique. Utiliser le mot génocide, c’est condamner ses responsables politiques, son idéologie, en l’occurrence le Parmehutu ou le Hutu Power: le pouvoir appartient au Bahutu et les Batutsi sont des citoyens de seconde, s’ils refusent ce statut, ils seront massacrés. Hélas, c’est ce qui s’est passé.
  2. Utiliser le mot, c’est désigner le coupable, proférer un jugement sur le bourreau. Espérer avec ce nouveau mot, recréer l’espace d’une cité réconciliée avec elle-même. À la fois une condamnation de coupables et un espoir de réconciliation.
  3. Le négationniste relativise ou nie le génocide pour des raisons politiques ou idéologiques. Le négationniste originel refuse la défaite morale de l’idéologie Parmehutu/Hutu Power. Il préfère les mots comme «massacre», «la guerre», «légitime défense», «massacre interethnique».
  4. Le négationnisme dépasse le simple cadre d’un mensonge au sens strict, ce n’est pas non plus une négation au sens, parfois, il dit les Tutsi sont morts, pendant la guerre. Il ajoute aussitôt les Hutu aussi. Le négationnisme n’est pas non plus une provocation, ni une erreur; il procède d’une intention volontairement assumée de soutenir l’idéologie qui a justifié le génocide.
  5. On doit donc faire la distinction entre les génocidaires comme négationnistes originels et les historiens ambivalents.
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Les tenants de l’explication ethnologique du génocide

« L’extermination de l’homme par l’État, n’est-ce pas la question essentielle de notre temps, de notre morale, une question qui a marqué la psychologie de chaque famille?» De la vérité de l’art.

  1. Le génocide a lieu, souvent, quand l’État organise l’extermination d’un groupe de la population dont il a le mandat de protéger. Qui a le pouvoir de commettre un génocide? C’est un État ou une organisation politique contrôlant un territoire ou un pays donné. Les Juifs/Régime nazi (1940-1945); Les Arméniens/Empire ottoman (1915-1916) ; Les Tutsi/L’État rwandais sous la gouverne du Hutu Power.
  2. Comment s’organise un génocide? Propagande utilisant les idéologies axées sur : le rejet, la haine, l’humiliation du groupe visé avant le massacre : le rôle des idéologies de la haine, la création de la figure de l’autre à haïr, à discriminer et, éventuellement, à tuer.
  3. Les acteurs de massacres ?

Police, armée et milice : le gouvernement allemand (lois), armée et police allemandes et les SS, milices nazis/Les Jeunes Turcs pour tuer les Arméniens.

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  1. Au lieu d’étudier cette défaillance de l’état vis-à-vis du contrat social qu’il a avec ses citoyens en termes d’organisation des institutions, ces africanistes ramènent le génocide à leurs lunettes d’ethnologues qui voient la vie sociale, économique et politiques en Afrique en termes de interethniques. Sur le génocide des Tutsi, le mot est souvent évité, ils disent que ce sont des massacres interethniques au détriment des Batutsi parce que c’était une minorité qui n’avait pas les moyens de se défendre (Jean-Claude Willame, Aux sources de l’hécatombe rwandaise, 1995; Mahmood Mamdani, When victims became killers, 2002, Filip Reyntjens, L’Afrique des Grands Lacs en crise, 1994; Jan Vansina, Antecedents to Modern Rwanda, 2001). L’ethnicité devient alors une catégorie expliquant les massacres de Tutsi sous prétexte que les rebelles du FPR sont en guerre avec le gouvernement de Kigali. Il en est de même pour certains experts au TIR. Le génocide a eu lieu, mais ils émettent des doutes sur l’organisation. Or, le génocide est défini par son planification; sans projet de décimation d’un groupe par l’état.
  2. Certains vont même dire que le Général Habyarimana protégeait les Batutsi contre ses extrémistes de son groupe politique (Reintjens, 1994) ! Si le génocide est ramené aux simples dimensions de conflit ethnique qui a dégénéré dans le contexte d’une longue guerre de presque quatre ans; les frontières entre victime et bourreau deviennent floues. Des historiens disent que les Bahutu avaient souffert des politiques précoloniales et coloniales, et voulaient combattre l’ennemi à leurs portes, accomplir un acte de vengeance, d’expiation du sang des leurs versés des siècles durant par les Batutsi. Une simple vengeance puisque la guerre faisait peur aux Bahutu dès en 1990. On parle alors des victimes qui sont devenues des bourreaux (Mamdani, 2002). Ce faisant, les africanologues « plient l’histoire à leur conception du monde» (Finkielkraut, 1982 : 53). Mal nommer les choses, jugeait Albert Camus, c’est ajouter au malheur du monde.
  3. Tous les discours fumeux sur le génocide des Tutsi s’y engouffrent.

Les médias  et le doute sur la notion de vérité

La démarche postmoderne consiste à relativiser la notion de vérité; elle est assez partagée, en Occident, du moins.

  1. L’ouvrage de François Lyotard, La condition postmoderne. Rapport sur le savoir, 1979, est l’un des études essentielles sur l’époque contemporaine où, dans la postmodernité, « l’objectivité » a été déclarée comme un mythe.» (p. 54) Ce climat général de doute sur les grands récits et de relativisme sur la notion de vérité a créé un seuil d’acceptabilité des énoncés négationnistes dans l’espace public.
  2. Les négationnistes se trouvent dans cette franche des élites, surtout dans les médias, qui s’adressent à un public désabusé, gauchisant, tiers-mondiste, généralement antisémite ou raciste. Judi Reever, Rwanda, l’éloge du sang, 2020; Charles Onana, Charles Onana, la vérité sur l’opération Turquoise, 2019. Enquête sur un attentat, 2021; Pierre Péan, Noire fureurs, blancs menteurs)
  3. Voici les deux thèmes qu’ils chérissent :
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La thèse du double génocide

Le Front patriotique rwandais, qui a stoppé le génocide en juillet 1994, serait responsable non seulement des massacres de Tutsi, mais aussi des massacres de Hutu.

Le début : On parle alors de double génocide, de génocides ou d’extrémismes inverses et symétriques. Interrogé par les journalistes sur le pluriel du mot génocide de la version écrite de son discours, François Mitterrand répondait déjà en 1994 : «Voulez-vous dire que le génocide s’est arrêté avec la victoire des Tutsi ? Je m’interroge aussi.»[1]

L’assassinat du Général Habyarimana est attribué au FPR

En 2006, un juge français, Jean-Louis Bruguière, ouvre une information judiciaire et ordonne un mandat d’arrêt contre neuf officiers supérieurs du FPR. Le non-lieu est annoncé, ce qui donne raison au FPR et à ses officiers qui avaient été précédemment inculpés par le juge Bruguière. Mais tous les négationnistes préfèrent s’en tenir à la version de Bruguière !

Réception de ces discours en Occident. Exemple livre de Judi Rever

Un éclairage profondément troublant sur le génocide rwandais.

» C’est le récit sans faille d’une des catastrophes humaines du XXe siècle les plus impitoyables et les plus cyniquement exploitées.  » Linden MacIntyre, journaliste d’investigation primé, CBC Television.» Enquête sur la manière dont Washington a participé à rendre opaque la véritable histoire du génocide rwandais.  » Helen Epstein, The New York Review of Books

» Explosif. Le récit officiel du Rwanda sur le génocide ne serait qu’un son de cloche réduit, simpliste et creux, ainsi que fondamentalement fallacieux.  » Kate Cronin-Furman, The Los Angeles Review of Books

« Ce livre d’investigation époustouflant a été réalisé par une journaliste au péril de sa vie. Il repose sur des centaines d’entretiens – déserteurs de l’armée rwandaise au pouvoir, anciens soldats, survivants d’atrocités, enquêteurs de l’ONU – et sur des documents issus du Tribunal pénal international pour le Rwanda qui sont reproduits en annexe du livre. Judi Rever apporte un éclairage profondément troublant sur le génocide rwandais, qui met en lumière l’importance du rôle du chef de l’État actuel, Paul Kagame.»

Émission « J’ai lu » du 24 septembre 2020  Pascal Boniface (antiIsraël)

Rwanda, l’éloge du sang a été élu livre de l’année par le Globe and Mail au Canada, a obtenu les prix Mavis-Gallant, Huguenot Society of Canada et a été finaliste du prestigieux Hilary Weston Prize.

Le négationnisme et sa propagande politique

L’épicentre : un site internet de (http://www.france-turquoise.com)

  1. Le site de l’association France Turquoise utilise un brouillage référentiel. Sa mission est de défendre l’honneur des vétérans français de l’Opération Turquoise soupçonnés d’avoir protégé les génocidaires des Tutsi. Divisée en plusieurs rubriques horizontales, elle est placée sous le logo de l’association qui représente le drapeau tricolore sur lequel sont apposés successivement le relief de l’hexagone, et un pigeon aux ailes déployées. On peut donc penser que cette association se sent investie d’une mission de paix.
  2. La seconde figure une série de quatre photographies de véhicules militaires français, de soldats blancs et de personnes civiles noires en fuite. Ce support iconique qui évoque des scènes de guerre paraît ainsi contradictoire avec le logo qui présente l’association comme une messagère de paix. On ne parle pas directement de l’opération militaire française de l’été 1994. On y trouve des articles et des livres qui accusent le FPR et le président du Rwanda d’être responsables des massacres dans la droite ligne de la rhétorique qui consiste à inverser les rôles quand on attaque son adversaire.
  3. Le lecteur peut s’interroger sur la relation entre ces reportages tirés des écrits divers et l’association France Turquoise. C’est à travers le message destiné «au rétablissement de la vérité sur l’action de l’armée française et des militaires français au Rwanda» et la mise en perspective de la situation géopolitique actuelle que s’opère le tournant négationniste. Si les rubriques comme «Qui sommes-nous ?» ou «Histoire récente» et «Galerie» répondent au but affiché du travail de mémoire de l’opération Turquoise, les rubriques «Revue de presse», «Communiqués», «Notes de lecture» empruntent un discours souvent polémique destiné à nier le caractère singulier du génocide des Tutsi.
  4. Par ailleurs, le site présente une dépêche de l’agence Reuter reprise par le magazine français l’Express le 20 février 2008 qualifiant de «génocide» un massacre qu’auraient perpétré des rebelles tutsi sur d’une trentaine de Hutu dans le Nord-Kivu en République Démocratique du Congo. Par ailleurs, Bernard Lugan, auteur du livre François Mitterrand, l’armée française et le Rwanda, qualifié de « véritable ouvrage d’histoire militaire».
  5. De surcroît, le commentaire du livre Négrologie de Stephen Smith publié en 2007 insiste sur l’envergure des tueries qu’aurait organisées le FPR, avançant l’argument du double génocide : «L’auteur [Stephen Smith] mentionne que s’il y a eu un génocide de Tutsis, il y a eu aussi des massacres organisée et prémédités de grande ampleur de Hutu (au moins 600.000 personnes) dont une partie non négligeable par le FPR de Paul Kagame, ce qui en en (sic!) bon français, s’appelle une guerre civile».
  6. Par ailleurs, Bernard Lugan, auteur du livre François Mitterrand, l’armée française et le Rwanda (2005), qualifié de « véritable ouvrage d’histoire militaire», se voit accorder un rôle favorable de polémiste négationniste. Or cela lui vaudrait d’être «efficacement satanisé et accusé de racisme» par les tenants de la recherche universitaire (consulté le 12-05-2008).
  7. On peut enfin mentionner la critique apportée au sujet du film d’Alain Tasma et Gilles Taurant La route piégée du Rwanda (2007). Frédéric Pons qui la signe regrette qu’il ne montre pas que «l’armée française a arrêté des massacres, protégé les populations et sauvé des vies» alors qu’il adresse ses remerciements au «général président Kaul Kagamé et à son chef d’état-major, James Kabarebe». Ce dernier est qualifié de «dignitaire tutsi […] fortement suspecté de crimes de guerre au Rwanda et au Congo» (consulté le 11-05-2008).
  8. Ce type d’argumentation opère par renversement des rôles entre agents (les soldats français de l’opération Turquoise) et patients (les Tutsi). Le but consiste à charger le patient de la responsabilité du crime qu’il a subi, afin de disculper l’agent, en l’occurrence l’armée française, dont le degré d’implication dans le génocide des Tutsi reste encore à établir par la justice et la recherche historiographique.
(Photo: Karirima)

Citations

  1. DEUX TEMOINS SOUHAITENT ÊTRE ENTENDUSPARIS – Deux anciens proches du président rwandais Paul Kagame réfugiés en Afrique du Sud et réclamés par la justice française qui enquête sur l’attentat en 1994 contre l’avion de Juvénal Habyarimana, se disent prêts à témoigner devant les juges, dans deux entretiens à RFI. L’ancien chef d’état-major rwandais Faustin Kayumba Nyamwasa, qui accuse Paul Kagame d’être responsable de cet attentat, dit être « prêt à leur apporter toutes les preuves dont dispose », dans l’entretien diffusé mardi par la radio française. Sur le rôle qu’il aurait joué dans cet attentat qui a déclenché le génocide contre les tutsi, le général rwandais refuse de s’expliquer, disant qu’il va « en parler avec le juge ». RFI a également diffusé un entretien avec Patrick Karegeya, ancien chef du renseignement extérieur du Rwanda, lui aussi réfugié en Afrique du Sud, qui se dit aussi prêt à rencontrer les juges français.L’ancien chef d’état-major rwandais fait partie des neuf proches de M. Kagame initialement visés par un mandat d’arrêt international émis en 2006 par l’ancien juge Jean-Louis Bruguière. Faustin Kayumba Nyamwasa et Patrick Kakegeya, ainsi que deux autres anciens dignitaires rwandais exilés et passés à l’opposition, ont été jugés par contumace par un tribunal militaire rwandais pour désertion, diffamation et menace à la sécurité d’État et condamnés à de lourdes peines de prison.

2. «C’est ainsi qu’on écrit l’Histoire et manipule les opinions : en usant de fake news. La doxa voulue par Kagame pour « externaliser sa culpabilité et s’approprier la victime »6 du drame rwandais en est truffée. Ses missi dominici charges de l’imposer7 au monde en usent largement.»

  1. L’Empire du silence. Un film sur Dr Denis Mukwege

Pour médecins sans frontières Patrick de Saint-Exupéry est un faussaire

Hubert Védrine s’interroge sur l’étrange cécité qui frappe Les Médias français dès qu’ils abordent le drame rwandais

Les citations apocryphes du drame rwandais.

  1. Le véritable enjeu de ce livre qui s’apparente à un micro-trottoir plus qu’à un reportage d’investigation, est clairement de disqualifier le Rapport Mapping publié en 2010 et qui met en lumière les crimes de masse commis par les troupes de Kigali en République démocratique du Congo. Le fait qu’il paraisse avant la publication du rapport Duclert, l’audition du Dr Mukwege par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et le voyage à Kigali du président de la République ne manque pas d’interroger. Quoi qu’il en soit, un nouvel expert du dossier, Luc Henkinbrant, docteur en droit et l’un des rédacteurs du Rapport Mapping, intervient à son tour sur Médiapart pour dénoncer l’imposture de Patrick de Saint-Exupéry qu’il accuse à son tour de négationnisme, réponse du berger à la bergère.

Le site INSHUTI (http://www.inshuti.org) (consulté le 12-05-2008) emprunte grandement à cette stratégie discursive de la véhémence.

Animé par plusieurs intervenants francophones , il prend pour cible principale la personne même de Paul Kagamé, l’actuel président de République, l’accusant d’être l’instigateur du génocide de son propre peuple. Ainsi la section intitulée «Lettre à Paul Kagamé» rédigée par Bernard Desgagné, chroniqueur d’Inshuti accuse le président Paul Kagamé d’être un criminel en utilisant la catégorie de la véhémence prononce la culpabilité de l’interlocuteur, gratuitement.

Titre de Desgagné

https://www.francophonieavenir.com/Archives/Index_B.Desgagne_Sur_Paul_Kagame,_le_President-genocidaire_du_Rwanda.htm?msclkid=a968750faa4811ec95733be76b9eef2d

Appui médiatique aux assassins

Radio-Canada poursuit sa besogne répugnante

Un autre site intéressant, par la complexité de ses formes de communication :

Le site intitulé  Toute l’actualité du Rwanda géré par Gaspard Musabyimana (http://www.musabyimana.be/) (consulté le 12-05-2008) emprunte au modèle adopté par David Irving (historien antisémite et raciste anglais).

Le site intitulé Toute l’actualité du Rwanda géré par Gaspard Musabyimana emprunte au modèle adopté par David Irving, même si sa présentation s’apparente moins à un journal en ligne. Il est l’auteur de quatre ouvrages édités chez l’Harmattan et de deux autres diffusés à compte d’auteur, informations confirmées par le site de l’Harmattan. En outre, l’internaute apprend que Gaspard Musabyimana, ancien fonctionnaire du gouvernement rwandais, réside actuellement en Belgique où il intervient dans le cadre scolaire pour raconter des contes rwandais traduits en flamand. Enfin, il affirme collaborer avec le TPIR comme témoin aux Assises de Bruxelles dans le jugement du Major rwandais Bernard Ntuyahaga.

Ce qui rapproche le site de Gaspard Musabyimana de celui de David Irving est également la présence non motivée de l’érotisme dans cet univers discursif dévolu au négationnisme. Par ailleurs, les différents auteurs invités à s’exprimer sur son site appellent leurs adversaires, accusés de violer la liberté d’expression, au «débat contradictoire» pour parvenir à une «justice équitable», d’où sortirait «la solution définitive des problèmes» dont souffrirait la société rwandaise emprunte au modèle adopté. Dans cette section, on découvre également la théorie du complot fomenté par les Etats-Unis et exécuté par leur supposé agent Paul Kagamé pour mener à bien son «hold up» sur le Rwanda, au nom de la «realpolitik» américaine. Dans ce cadre discursif, il faut donc s’interroger sur la présence de trois articles de Gaspard Musabyimana consacrés à une approche anthropologique de la sexualité pratiquée au Rwanda dans les années 1950.

Regroupés dans une section appelée pudiquement « culture », ces textes sont tirés d’un ouvrage intitulé Pratique et Rites sexuels au Rwanda publié chez l’Harmattan en 2006. Comme la notice biographique du site l’indique, rien ne laisse deviner la compétence de l’auteur en la matière. C’est précisément le fonctionnement communicatif de cet espace récréatif, qui se veut davantage ludique et interactif, qu’il faut analyser dans le cas du site de Radio Iwacu. Émettant en kinyarwanda, en français et en anglais, ce site s’adresse résolument au public des jeunes, comme le suggère la présentation iconographique en couleurs vives.

Tout semble être dans le jeu de la variation, de l’éphémère et de l’excitant, sauf la thèse soutenue dans la page d’accueil, affirmant que le régime politique actuellement en place à Kigali serait celui des « bourreaux rwandais ».

Conclusion

  1. Réutiliser les termes des négationnistes de la Shoah.
  2. Déstabiliser le savoir historiographique par l’attaque et la disqualification des personnes présentées comme ses interlocuteurs, par une argumentation par le «pathos agressif».
  3. La spécificité des sites négationnistes du génocide des Tutsi consiste non pas à vouloir nier l’existence d’un génocide – contrairement au déni de la Shoah – mais à brouiller la catégorie des victimes en vidant de sa substance le concept même de génocide et à confondre la chaîne des responsabilités entre les différents acteurs historiques. Par une argumentation de l’inversion de rôles. La visée est polémique et politique est affirmée.
  4. Le polémiste se place du côté du Bien, tandis que ses opposants sont mis dans le camp du Mal. Il se présente comme porte-parole des pauvres Bahutu victimes de Kagame et des Batutsi. Une idée sous-entendue : redonner au pouvoir, à la majorité.
  5. Ils utilisent la fonction de plaisir ludique, qui a été acceptée par Internet, le magazine en ligne Action Report de David Irving, Iwaca ou le site de Gaspard Musabyiman.
  6. De façon spécifique le site (http://www.france-turquoise.com) sert d’archives, de bibliothèque centrale pour les écrits et le matériel qui associe le gouvernement rwandais actuel aux crimes du Rwanda et du Congo.

 

 

[1] Cité par Jean-Paul Gouteux dans La nuit rwandaise (2002, p.334).